De plus en plus de paroissiens veulent en faire un haut lieu de pèlerinage


QUÉBEC – S’il n’en tient qu’à certains paroissiens, l’église Saint-Roch pourrait devenir un haut lieu de pèlerinage comparable à Sainte-Anne-de-Beaupré. Le projet, qui récolte de plus en plus d’appuis, comprend même l’idée d’en faire un lieu de tolérance religieuse en y donnant une place aux musulmans.


Poussée par le marguillier de l’église, Dominique Bergeron, la démarche vise à en faire une destination dont l’envergure dépasserait de loin la paroisse. Dans le document qu’il fait circuler depuis quelques mois, M. Bergeron propose qu’on demande au pape de reconnaître Saint-Roch comme une «basilique mineure».


Contrairement à une cathédrale qui se définit comme la résidence de l’évêque, une basilique est définie par le rôle particulier qu’elle joue dans sa communauté. Ce qu’elle est déjà en «accueillant dans ses murs les exclus, les pauvres, les itinérants, les ex-prisonniers, les accros de rêves artificiels, les malades du sida, les chercheurs de bonheur et de paix», plaide M. Bergeron.


Ce paroissien qui siège au conseil d’administration de l’église parle d’un projet «pour le quartier» et y voit notamment une façon de «contrer» l’arrivée de sectes comme l’Église de la Scientologie, qui s’est installée dans la même rue. Il suggère entre autres choses de donner une envergure «nationale» à la tradition annuelle de la bénédiction des chiens et d’en faire un lieu d’oecuménisme en donnant une place aux musulmans. «Prenons l’exemple de la basilique d’Alger, en Algérie. Ce sanctuaire […] attire aussi bien les chrétiens que les musulmans, dans un coude-à-coude fraternel et respectueux. Chaque jour, près de trois cents musulmans viennent prier la Vierge sans rien renier de leur foi.» Il propose aussi d’intégrer à la future basilique des sanctuaires dédiés à Dina Bélanger et à mère Julienne, qui sont nées toutes deux dans le quartier.


Le curé de la paroisse, Jean Picher, se dit ouvert à ces démarches, mais il souligne qu’on en est encore à l’étape de la réflexion. «L’idée, c’est de donner à l’église une vocation plus que paroissiale. […] On réfléchit à la meilleure façon de faire reconnaître l’importance de l’église. Il n’y a pas de décision ferme de prise.»


Le curé, qui est en poste depuis août dernier, n’est par ailleurs pas gagné à la formule de la basilique. «Ce serait encore plus simple de la faire reconnaître comme sanctuaire, parce que ce statut relève de l’évêque tandis que la basilique relève du pape.» Il cite comme exemple le cas de l’église Sainte-Thérèse-de-l’Enfant-Jésus, qui «attire des gens qui normalement ne viendraient pas» depuis qu’elle a obtenu le statut de sanctuaire. «Les gens font des pèlerinages, des neuvaines de prières, des célébrations spéciales autour de sainte Thérèse.»



Des appuis


Dans une correspondance datant de l’automne 2009, un mandataire du cardinal Ouellet avait écrit à M. Bergeron pour l’encourager à poursuivre ses démarches. Or M. Ouellet parti pour Rome, il faudra vraisemblablement attendre la nomination d’un nouvel évêque avant de voir avancer le dossier à ce niveau.


En attendant, l’initiative recueille des appuis. Des dizaines de paroissiens et de touristes ont salué le projet dans une sorte de pétition laissée sur place. M. Bergeron dit également avoir reçu beaucoup d’appuis lors du sommet Actions Saint-Roch, qui s’est tenu il y a quelques semaines.


Construite en 1918, Saint-Roch n’a pas le statut de monument historique au même titre que l’église Saint-Jean-Baptiste, par exemple, mais la Ville de Québec la considère comme un lieu de valeur patrimoniale «élevée».


Son patron, saint Roch, est considéré comme le patron des voyageurs et des exclus. On raconte qu’il a guéri des malades de la peste durant ses voyages, avant de contracter la maladie à son tour. Un chien lui aurait apporté de la nourriture alors qu’il se cachait dans les bois, une anecdote à l’origine de la tradition de la bénédiction des chiens.



Isabelle Porter
Le Devoir