Vouloir sauver des églises sans se faire d’illusions

Les églises du Québec sont désertées. La grande majorité des couvents sont à vendre. Ici et là, des voix se font entendre pour sauver de la démolition ces monuments témoins de tout un pan de l’histoire du Québec. Historien de l’architecture, directeur de l’Institut du patrimoine, professeur, Luc Noppen est désormais l’heureux propriétaire, avec un groupe d’investisseurs, de l’église de Sainte-Brigide de Kildare, en voie d’être transformée en centre communautaire. À tous ceux qui s’élèvent contre la vente des églises par les fabriques ou, pire encore, contre leur démolition, il dit: «Organisez-vous en groupe et achetez-les.»


D’entrée de jeu, il précise cependant en entrevue: «Si vous avez un ami, ne lui donnez pas une église, vous allez le mettre en faillite.» Car une église ne vaut rien de plus que la valeur du terrain où elle est, précise-t-il. Et en plus, elle coûte cher. Pour les fabriques, les églises entraînent en moyenne des frais de 300 000 $ par année, divisés plus ou moins en parts égales entre le personnel et l’entretien du bâtiment. À cause de leur taille, les églises sont difficilement convertibles en condominiums, leurs murs n’étant pas conçus pour soutenir de nombreux étages.


Cela n’empêche pas Luc Noppen, belge d’origine, de souhaiter préserver les églises du Québec. Dans la jeune Amérique, plusieurs régions n’ont que l’église comme monument, faisait-il valoir avec des confrères en introduction du livre Quel avenir pour quelles églises?, publié aux presses de l’Université du Québec. Il propose que soient préservées 40 % des églises québécoises choisies. Choisies par qui? La question demeure. Car il faudra alors décider quelles églises sauver. Il y a présentement environ 3000 églises en difficulté au Québec, dont l’immense majorité ne sont évidemment pas classées comme monuments historiques. Et M. Noppen ne croit pas qu’il faille sauver toutes les églises à n’importe quel prix.


Il faut d’abord préciser à qui appartiennent les églises. Car elles sont bien privées, précise l’historien de l’architecture. En fait, les églises appartiennent aux fabriques, qui sont elles-mêmes souvent endettées envers le diocèse. Selon M. Noppen, il est par ailleurs complètement irréaliste de penser que l’État peut prendre en charge la totalité des églises du Québec. Croit-on vraiment que toutes les églises, déjà pratiquement vides, se rempliront spontanément de touristes sous le simple prétexte que l’on en a ouvert les portes?


Car il ne faut pas se faire d’illusions, ajoute-t-il. À moyen terme, on peut déjà prévoir que la presque totalité des églises du Québec n’auront plus ni budget, ni fidèles, ni même de prêtres pour y célébrer la messe. Si les citoyens sont attachés à leur église, il faudra que ce soient eux qui leur trouvent une vocation. «Nul besoin de quelque sentiment religieux pour ressentir de l’attachement à « son » église», précise-t-on encore dans Quel avenir pour quelles églises? Dans le cas de l’église du Très-Saint-Nom-de-Jésus, et de l’orgue magnifique qu’elle abrite, Luc Noppen avait proposé que l’on en fasse une sorte de «maison de l’orgue», où l’on dispenserait de la formation, par exemple. À ce jour, sa proposition n’a pas été retenue. L’expert est par ailleurs régulièrement sollicité par des municipalités ou par des citoyens soucieux de l’avenir de leur patrimoine religieux. Alors que le Conseil du patrimoine religieux du Québec, un organisme financé par le gouvernement du Québec peut offrir jusqu’à 70 % du budget de restauration de l’immeuble, la plupart des fabriques n’ont même pas les 30 % supplémentaires nécessaires à la réalisation des travaux…



L’église doit redevenir communautaire


Or, «l’église peut et doit redevenir communautaire», poursuivaient Luc Noppen et son équipe, dans Quel avenir pour quelles églises? Dans l’église Sainte-Brigide, on devrait donner sous peu des cours de cirque, la hauteur des murs favorisant les parcours de trapèze… Le projet, qui inclut le presbytère, compte également la construction de logements destinés à des familles haïtiennes.


Quant aux couvents québécois, dont la majorité sont également à vendre, ils appartiennent aux communautés religieuses, qui sont également en déclin. Celles-ci, qui regroupent pratiquement toujours des femmes, ont en effet fait faire des prévisions démographiques alarmantes prévoyant leur disparition à moyen terme. Les communautés doivent également assurer le soutien infirmier et hospitalier de leur population vieillissante. Ces frais peuvent équivaloir à 65 000 $ par personne par année, pour un groupe dont les placements ont souvent fondu au cours des dernières années comme neige au soleil. Les communautés religieuses masculines ont pour leur part déjà largement procédé au transfert de la plupart de leurs membres, et la gestion des couvents demeure essentiellement un problème féminin, dit M. Noppen.


Il faut sans doute ici tenir compte de la sensibilité des Québécois par rapport à la gestion de leur patrimoine religieux. On fait moins de cas, à Toronto, par exemple, de la démolition d’une église ou de sa conversion en condos, dit M. Noppen. Le Québec ne remporterait cependant pas, contrairement à la croyance populaire, le championnat du nombre d’églises par habitant. On n’y compte en effet qu’une église pour 1250 habitants, alors que l’Ontario en compterait une pour 850 habitants, et l’île du Prince-Édouard une pour 450 habitants, ajoute-t-il.


Reste que pour convertir une église en centre communautaire, il faut procéder à sa désacralisation. Encore là, des aménagements avec l’église, si certains cultes sont encore pratiqués, peuvent toujours être possibles.


«L’angélisme n’est plus de mise», comme l’indiquait Luc Noppen toujours en introduction de son livre. «Si l’on veut sauver le patrimoine ecclésial, il va falloir convertir les églises, leur trouver un nouvel usage qui permette d’équilibrer revenus et dépenses. Et on devra toutes les convertir: celles qui sont ou seront désaffectées par le culte — à terme elles le seront presque toutes — et les quelques autres qui resteront ouvertes au culte.»


Les églises devront donc, pour survivre, se trouver un autre destin.



Caroline Montpetit
Le Devoir

Le cardinal Marc Ouellet est nommé préfet de la Congrégation pour les évêques

Le Vatican a annoncé aujourd’hui la nomination de l’archevêque de Québec, le cardinal Marc Ouellet, à la tête de la Congrégation pour les évêques. La rumeur sur cette nomination circulait depuis plusieurs jours.


Le poste de préfet de la Congrégation des évêques confère à son titulaire le pouvoir de sélectionner les évêques en vue de leur nomination par le pape.


Le primat du Canada succèdera au cardinal Giovanni Battista Re, qui prend sa retraite après avoir occupé ce poste pendant près d’une décennie.


Comme son prédécesseur, Mgr Ouellet, qui est âgé de 66 ans, sera aussi président de la Commission pontificale pour l’Amérique latine.


L’archevêque de Québec dit accepter avec un mélange de joie et de crainte la nouvelle mission qui lui est proposée à Rome par le pape Benoît XVI.


En conférence de presse cet après-midi, il a expliqué que les responsabilités du préfet de la Congrégation des évêques sont énormes. Il a entre autres évoqué ce qu’il a appelé les «situations difficiles» qui peuvent survenir, en référence au scandale des prêtres pédophiles qui continue à défrayer les manchettes.


Puis, d’une voix brisée par l’émotion, il s’est dit attristé de quitter le diocèse de Québec, où il dit avoir tissé des liens profonds depuis son arrivée en 2002.


Le cardinal Ouellet a par ailleurs déclaré ne pas avoir été surpris par les réactions générées par certains de ses propos, notamment concernant l’avortement. Il dit avoir essayé de donner l’exemple, sans être parfait, et que son engagement s’est fait en toute conscience.


Il en a aussi profité pour décocher une flèche aux médias, déclarant que l’image médiatique faite de lui représentait un obstacle à ses contacts avec les gens. Mais une fois la discussion engagée, a-t-il dit, les préjugés tombaient.


Mgr Ouellet rencontrera le pape la semaine prochaine. Il a rappelé connaître Benoît XVI depuis longtemps, et souligné que le pape sait qu’il pourra compter sur lui dans les moments difficiles.


Le Vatican a également annoncé que Mgr Rino Fisichella prend la tête d’un nouveau ministère chargé de promouvoir l’évangélisation dans les pays catholiques qui se tournent vers la sécularisation.


Mgr Fisichella était président de l’Académie pontificale pour la vie et recteur de l’Université pontificale du Latran.



Rien de bon pour les femmes


Réagissant à cette nouvelle, Québec solidaire et la Fédération des femmes du Québec ont fait savoir que cette nomination n’augure rien de bon pour les droits des femmes.


Mgr Jean-Claude Turcotte, archevêque du diocèse de Montréal, soutient pour sa part que l’Église québécoise va bénéficier de la présence à Rome d’un prélat aussi influent.


À titre de chef de la Congrégation pour les évêques, le cardinal Ouellet aura pour tâche de présenter au pape Benoît XVI les noms des futurs évêques de plusieurs endroits à travers le monde, notamment en Amérique latine.


Or, les positions ultraconservatrices de Marc Ouellet concernant l’avortement, l’euthanasie, le mariage gai et l’enseignement religieux vont assurément influencer le choix des futurs évêques, s’inquiète Québec solidaire.


Loin d’être une bonne nouvelle, le départ pour Rome du cardinal Ouellet confirme le grand «vent de droite qui souffle sur l’Église», a dit la leader de la formation de gauche, Françoise David.


Alors que l’Église semble se replier sur ses positions traditionnelles, Mme David redoute la désignation, au Québec, d’un successeur tout aussi inflexible que Mgr Ouellet sur les questions morales.


«Je crains beaucoup qu’il y ait des évêques qui soient nommés au Québec et qui soient des gens extrêmement rigides, très proches des idées de Rome, alors que pendant plusieurs années nous avons eu au Québec des évêques plus conciliants, plus proches des idées modernes», a-t-elle dit.


Pour les femmes, surtout celles d’Amérique latine et du tiers-monde, la nomination de Marc Ouellet est un bien mauvais présage, croit aussi la Fédération des femmes du Québec.


La présidente de la fédération, Alexa Conradi craint de nouvelles attaques contre le droit à l’avortement dans les pays où l’Église catholique continue de colorer les politiques publiques.



Des retombées positives


Mais pour l’archevêque de Montréal, Jean-Claude Turcotte, l’important ministère du Vatican confié au cardinal québécois aura des retombées positives au Québec.


«Je me réjouis. Je pense que ça va aider notre pays d’avoir quelqu’un là-bas qui compte parmi les 10 plus proches collaborateurs du Saint-Père, qui connaît le Québec et qui pourra apporter une meilleure connaissance là-bas des problèmes que nous connaissons ici», a-t-il dit.


Abbé à la paroisse Sainte-Anne-de-Varennes, Raymond Poisson convient que les positions exprimées par Mgr Ouellet ont rendu difficiles ses relations avec la vaste majorité de la population québécoise, y compris les fidèles.


Pourtant, qu’il s’agisse de son opposition très stricte à l’avortement ou au mariage gai, le cardinal n’a fait qu’exprimer les valeurs de l’Église, a-t-il fait remarquer.


«Peut-être que Mgr Ouellet n’a pas eu la meilleure occasion, ou le meilleur tact possible, pour rappeler des positions fondamentales de l’Église par rapport à l’euthanasie ou à l’avortement», a prudemment avancé l’abbé.



Le Devoir

The Beat Hotel, a forthcoming documentary film

Puisqu’on parle de BRION GYSIN :

The Beat Hotel
Alan Govenar, USA, 2011

 

The Beat Hotel, a new film by Documentary Arts, goes deep into the legacy of the American Beats in Paris during the heady years between 1957 and 1963, when Allen Ginsberg, Peter Orlovsky and Gregory Corso fled the obscenity trials in the United States surrounding the publication of Ginsbergs poem Howl. They took refuge in a cheap no-name hotel they had heard about at 9, Rue Git le Coeur and were soon joined by William Burroughs, Ian Somerville, Brion Gysin, and others from England and elsewhere in Europe, seeking out the freedom that the Latin Quarter of Paris might provide.

The Beat Hotel, as it came to be called, was a sanctuary of creativity, but was also, as British photographer Harold Chapman recalls, an entire community of complete oddballs, bizarre, strange people, poets, writers, artists, musicians, pimps, prostitutes, policemen, and everybody you could imagine. And in this environment, Burroughs finished his controversial book Naked Lunch; Ian Somerville and Brion Gysin invented the Dream Machine; Corso wrote some of his greatest poems; and Harold Norse, in his own cut-up experiments, wrote the novella, aptly called The Beat Hotel.

The film tracks down Harold Chapman in the small seaside town of Deal in Kent England. Chapmans photographs are iconic of a time and place when Ginsberg, Orlovsky, Corso, Burroughs, Gysin, Somerville and Norse were just beginning to establish themselves on the international scene. Chapman lived in the attic of the hotel, and according to Ginsberg didnt say a word for two years because he wanted to be invisible and to document the scene as it actually happened.

In the film, Chapmans photographs and stylized dramatic recreations of his stories meld with the recollections of Elliot Rudie, a Scottish artist, whose drawings of his time in the hotel offer a poignant and sometimes humorous counterpoint. The memories of Chapman and Rudie interweave with the insights of French artist Jean-Jacques Lebel, author Barry Miles, Danish filmmaker Lars Movin, and the first hand accounts of Oliver Harris, Regina Weinrich, Patrick Amie, Eddie Woods, and 95 year old George Whitman, among others, to evoke a portrait of Ginsberg, Burroughs, Corso and the oddities of the Beat Hotel that is at once unexpected and revealing.

The Beat Hotel is currently in production and is scheduled to be released in the Fall of 2009 (?).’

 

thebeathotelmovie.com

The New Museum Contemporary Art (NYC) will present “Brion Gysin: Dream Machine”


Gysin's Dreamachine

The New Museum will present “Brion Gysin: Dream Machine,” the first US retrospective of the work of the painter, performer, poet, and writer Brion Gysin (born 1916, Taplow, UK–died 1986, Paris). Working simultaneously in a variety of mediums, Gysin was an irrepressible inventor, serial collaborator, and subversive spirit whose considerable innovations continue to influence musicians and writers, as well as visual and new media artists today. The exhibition will include over 300 drawings, books, paintings, photo-collages, films, slide projections, and sound works, as well as an original Dreamachine—a kinetic light sculpture that utilizes the flicker effect to induce visions when experienced with closed eyes. “Brion Gysin: Dream Machine” is curated by Laura Hoptman, Kraus Family Senior Curator, and will be on view in the New Museum’s second floor gallery.



“An exhibition of an artist who died more than twenty years ago represents an approach to the notion of the new that is somewhat different from the Museum’s standard—one that emphasizes relevance and fresh information over chronology, and brings to the fore a relatively neglected yet very influential innovator who continues to have a strong impact on artists working today,” said Laura Hoptman.



In 1959, Gysin created the Cut-Up Method, in which words and phrases were literally cut up into pieces and then rearranged to untether them from their received meanings and reveal new ones. His Cut-Up experiments, which he shared with his lifelong friend and collaborator William S. Burroughs, culminated in Burroughs and Gysin’s The Third Mind, a book-length collage manifesto on the Cut-Up Method and its uses. Transferring this notion to experimenting with tape-recorded poems manipulated by a computer algorithm, Gysin created sound poetry and was among the earliest users of the computer in art. At the same creative moment, Gysin conceived of the Dreamachine. During the ’60s, ’70s, and ’80s, Gysin would continue his collaborations, and prove to be a mentor for myriad artists, poets, and musicians, from John Giorno to Brian Jones, to David Bowie and Patti Smith, to Genesis Breyer P-Orridge and Keith Haring, among many others.


“Brion Gysin: Dream Machine” will be accompanied by an illustrated catalogue co-published with Hugh Merrell, Ltd., featuring essays by Laura Hoptman; John Geiger, literary scholar and author of the definitive Gysin biography; Gerard Audinet, Chief Curator of the Musée d’art moderne de la ville de Paris, which houses Gysin’s artistic estate; James Grauerholz, Gysin’s friend and literary executor; as well as appreciations by contemporary artists, musicians, and poets including George Condo, Paul Elliman, Ugo Rondinone, Rirkrit Tiravanija, Cerith Wyn Evans, Shannon Ebner, Trisha Donnelly, and Sue de Beer.


Plus d’information ici.



***



Aussi à lire


The Unknown Loved by the Knowns, Randy Kennedy, The New York Times (21 juin 2010)


… ‘But now the New Museum of Contemporary Art has gathered the widely scattered pieces of Gysin’s strange, necromantic career and is working to haul him up from the underground once and for all with “Dream Machine,” the first retrospective of his art in the United States. The show, which opens July 7, will include more than 300 paintings, drawings, photo-collages and films, along with an original version of the Dreamachine, the spinning, light-emitting, trance-inducing kinetic sculpture that Gysin helped design with a computer programmer, Ian Sommerville, in 1960 that has become his most famous work. (The exhibition’s catalog includes a paper foldout and instructions to build your own Dreamachine, provided you can locate your old turntable.)’ …