Est-ce la fin de l’Église catholique au Québec?

Quelle métaphore que cette façade exsangue du Patro Saint-Vincent de Paul ornant la couverture du livre Modernité et religion au Québec. Où en sommes-nous? (dirigé par Robert Mager et Serge Cantin), qui vient de paraître aux Presses de l’Université Laval. Après plus de 20 ans de batailles entre les ministres de la Culture, l’Hôtel de Ville de Québec et les promoteurs, la ruine est finalement tombée sous le pic des démolisseurs, le 20 février.


«C’est comme l’Église catholique», raillait un quidam, dans un reportage, avant la démolition. Il ne restait que la façade, laquelle, sous certains angles, semblait avoir fière allure. La crise autour des prêtres pédophiles, qui secoue l’Église, l’institution, actuellement, agira-t-elle comme cette boule de démolition montée sur une grue, qui terrassa la façade? Plusieurs le croient. Certains le souhaitent. D’autres en doutent.


Car des crises, l’Église en a connu d’autres, il faut dire, en 2000 ans. Et des graves, répondent les experts: Révolution française, conquête anglaise de 1763, Révolution tranquille… Même que la «disparition du catholicisme» est devenue un grand classique de la sociologie des religions. Un thème qui semble réapparaître, chaque décennie, un peu comme un «mal de dents», lance à la blague E. Martin Meunier, sociologue à l’Université d’Ottawa, à l’autre bout du fil.


Malgré tout, cette crise-là apparaît plus grave que jamais. Elle est «capitale» puisqu’elle bouleverse jusqu’à la tête de l’Église elle-même. «C’est très dur», admet Jean Fortier, vicaire général du diocèse de Montréal. «Disons que ce n’est pas de la bonne publicité. Je pense qu’il y a une attente plus grande envers les agissements de l’Église, des prêtres, parce qu’on prêche des valeurs d’amour. La contradiction est plus grande et ça choque les gens. Et je pense qu’ils ont raison, l’Église a une plus grande responsabilité.»



«Catholiques malgré nous»


De nombreuses statistiques montrent depuis longtemps le déclin de l’Église catholique. Entre 1957 et 2000, le taux de fidèles allant à la messe le dimanche est tombé de 88 % à 20 %. Chez les jeunes, le phénomène est plus accentué encore: parmi les 18 à 34 ans, en 2000, il y avait 5 % de pratiquants seulement. Pratiquement dans tous les diocèses, l’âge moyen des prêtres dépasse les 70 ans. Dans l’archidiocèse de Québec, de 1997 à 2010, le nombre de curés et d’équipes pastorales est passé de 166 à 73.


De 1970 à 2001, l’Église québécoise trouvait dans les statistiques du recensement un certain réconfort. La proportion de Québécois se disant catholiques demeurait stable. C’est ce qu’explore E.-Martin Meunier, Jean-François Laniel et Jean-Christophe Demers dans une grande étude de quelque 50 pages publiée dans Modernité et religion au Québec. Même chose pour les baptêmes, dont les taux ne s’effondrèrent pas. Dans ces trois décennies, il y a une sorte «de permanence d’un catholicisme culturel», dit Martin Meunier. On se sent catholique parfois par inertie, souvent par lien avec les générations passées. C’est un marqueur de l’identité.


C’est le sociologue Raymond Lemieux, rappelle Meunier, qui développa la théorie du «catholicisme culturel» québécois, en 1990. À l’époque, il n’était pas surpris de constater une certaine permanence des «rites intégrateurs». Nous avons été, comme l’a déjà écrit le collègue Guillaume Bourgault-Côté, «catholiques malgré nous». Ou, pour le dire comme la revue l’Inconvénient (dans son numéro de novembre 2007), «chrétiens malgré nous».


Parfois, ce n’est pas «malgré». Il y a quelques rares cas recensés de catholiques «culturels» intellectuels. Le cinéaste Bernard Émond, qui se définit comme un «athée de culture catholique». L’écrivain et collaborateur du Devoir Jean Larose s’est déjà qualifié de «mécréant attaché au catholicisme» et «qui en pratique les textes». Bref, «un non-croyant pratiquant».



Nouvelle rupture


Il y a toutefois du nouveau sous le soleil. Et ce n’est plus rassurant pour ceux qui tiennent à l’Église comme marqueur de l’identité. Depuis 2001, les statistiques indiquent une nouvelle «rupture». «Les jeunes ne suivent pas. L’entrée en scène d’une nouvelle génération, la « Y » — celle qui est née entre 1976 et 1990 —, semble changer la donne», indique Martin Meunier. De 2001 à 2006, le prorata total de baptêmes par naissance au Québec chute: on passe de 73,5 % à 59,9 %. Même chose pour le fameux «taux d’appartenance» à l’Église, qui s’était auparavant quasiment maintenu pour l’ensemble de cette population: il passe de 78,2 % à 69,1 %.


Le fameux «catholicisme culturel» — où on se dit catholique non pratiquant, ou utilisant les baptêmes et les funérailles — commence à s’étioler. Il serait en voie «d’exculturation» au Québec.


Il y a là d’abord un effet de génération, mais le caractère non catholique des «Y» n’est évidemment pas la seule cause. D’autres événements sont venus précipiter le phénomène de décrochage. Dans l’ère post-11-Septembre et du débat sur les accommodements raisonnables, le regard sur les religions a muté, note Martin Meunier. «Il y a quelque chose qui s’est brisé dans le rapport entre le religieux et plusieurs Québécois.» Alors qu’on tolérait auparavant de se présenter comme «catholique culturel», la religion a recommencé à apparaître pour ce qu’elle est: une religion, et non plus seulement comme une étiquette identitaire sans grand effet.



L’effet Ratzinger et Ouellet


Deux personnages sont alors venus renforcer ce sentiment: les cardinaux Marc Ouellet et Joseph Ratzinger. En deux ans, de 2003 à 2005, l’un a pris la tête de l’Église du Québec, l’autre est devenu souverain pontife. Dès l’élection du second, en 2005, Martin Meunier (dans L’Annuaire du Québec 2006, Fides) évoqua la possibilité que, compte tenu des positions du cardinal allemand, son pontificat annonce «un divorce entre la culture québécoise» et le catholicisme institutionnel.


Dans ses encycliques portant sur la charité, l’espérance et l’amour, le pape Benoît XVI a «peut-être déjoué ses détracteurs», puisqu’il s’est montré moins tranchant que prévu, note Meunier. Mais plusieurs événements, entre autres l’excommunication d’une jeune fille violée au Brésil (décision d’abord appuyée puis dénoncée par le Vatican), les propos du pape sur le sida et le préservatif en Afrique ainsi que la béatification de Pie XII, ont accrédité la thèse d’un retour à une ère pré-Vatican II.


Pendant ce temps, à Québec, le cardinal Ouellet a relayé et renforcé, par plusieurs décisions et prises de position, ce sentiment. Le choc fut d’autant plus brutal que l’Église du Québec avait surtout été façonnée depuis des décennies par des catholiques de gauche qui, comme l’a écrit Meunier, avaient «marché à plein dans le renouveau personnaliste et communautaire du catholicisme post-Seconde Guerre mondiale». C’est entre autres eux, les Mgr Parent et autres père Lévesque, qui firent la Révolution tranquille. Mais les positions du cardinal Ouellet sur la «laïcité ouverte» et l’instauration du cours d’éthique et culture religieuse ont été «perçues par plusieurs comme des positions montrant des signes sinon d’intransigeance, du moins de raidissement», note Meunier. De plus, le cardinal se prévaut d’un titre historique et grandement honorifique, celui de primat de l’Église canadienne, pour contourner des instances comme l’Assemblée des évêques catholiques du Québec.


C’est dans ce contexte que le Québec reçoit le scandale des prêtres pédophiles. «Le moment actuel est désagréable, mais ce n’est pas la mort de l’institution», soutient toutefois Jean Fortier, bras droit du cardinal Turcotte. «Au Québec, on sait ce qui est arrivé avec la Révolution tranquille et la place que l’Église occupe depuis. Mais on n’a pas disparu et ce ne sera pas le cas non plus, même si la situation actuelle n’a rien pour redorer notre blason.» Martin Meunier ajoute: «Ce n’est pas tant la fin de l’Église au Québec que la fin du lien particulier que la culture québécoise avait continué d’entretenir avec le catholicisme.»



Antoine Robitaille
Avec la collaboration d’Alec Castonguay
Le Devoir



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Aussi à lire : Forte hausse des apostasies à Québec en 2009.


Tabou jadis, la procédure est carrément promue par certains aujourd’hui.


Québec — Le nombre de demandes d’apostasie — reniement de sa foi — a fortement augmenté en 2009 dans le diocèse de Québec, passant de 94 en 2008 à 212 l’an passé, soit une augmentation de 126 %. À l’archevêché, on estime que le phénomène «demeure marginal». Le directeur des communications, Jasmin Lemieux-Lefebvre, souligne que la population catholique globale est de 1 101 724 âmes. Il indique que pour l’instant, en 2010, «nous sommes dans la moyenne avec 30 demandes» …

Priest Off



Pas tant parce que ‘c’est drôle’ que parce qu’on dirait qu’on est rendu là, dans la culture populaire … L’équation ‘membres du clergé’ = ‘abuseurs d’enfants’ … C’est ‘drôle’ comme dans ‘ça sent drôle’ …


‘Update’ 19 avril 2010 : Autre rigolo ici.

Archevêché de Montréal, campagne annuelle

Église Catholique de Montréal, Campagne annuelle (2010), Conception: Maxime Jenniss et Sylvain Thomin

Je viens tout juste de croiser une affiche de la campagne de cette année … En fait, Maxime Jenniss qui a travaillé sur ladite campagne (ici l’année dernière) m’en avait un peu parlé … Avant que je la croise ‘dans la rue’ je veux dire.


Bref, en cherchant des photos je suis tombé sur le texte qui suit (datant du 24 mars 2009) :



Depuis maintenant presque vingt ans, l’agence de publicité montréalaise Bos signe la campagne annuelle de l’Archevêché de Montréal. Un regard sur la mise en marché de Dieu, dans une socité dominée par les médias et où l’on oublie souvent de se souvenir.


Il faut bien se rendre à l’évidence: l’Église a de plus en plus de mal à survivre dans le Québec moderne. Elle est d’ailleurs la première à le reconnaître. Devant une société qui s’est désacralisée de manière radicale il y a près d’un demi-siècle, et qui préfère, depuis, visiter les centres d’achats plutôt que les églises, l’Archevêché n’a pas eu le choix: il a dû user de stratagèmes publicitaires pour assurer sa survie. Il faut savoir vivre avec son temps.


Cela fera donc vingt ans l’an prochain que Bos compte l’Archevêché de Montréal parmi ses clients. Un client bien particulier, souligne Hugo Léger, membre de l’équipe création de l’agence, puisqu’il ne s’agit pas ici de vendre un produit, mais une idée. Il faut comprendre, en premier lieu, que le besoin pour l’Église catholique de développer une campagne publicitaire est bien nouveau. Il y a à peine cinquante ans, on n’aurait pas imaginé devoir recourir à de tels moyens pour faire vivre la communauté religieuse au Québec. C’était les pratiquants eux-mêmes qui, à l’époque, étaient les porte-parole de la foi. Le sermon du dimanche suffisait alors à fidéliser les paroissiens, qui savaient se montrer généreux quand venait l’heure de la quête. Mais la situation a bien changé: les églises sont vides, et le clergé vieillissant a du mal à assurer sa survie. La nécessité de trouver d’autres moyens de communiquer avec le public se faisant de plus en plus pressante, les dirigeants de l’Église montréalaise ont décidé de se tourner vers la publicité. Quoi de plus naturel, après tout? Comme l’a lui-même souligné le Cardinal Jean-Claude Turcotte, la prêche, c’est un peu comme une publicité dominicale.


Une fois par an, donc, à l’occasion de sa collecte annuelle, l’Église se permet d’envahir à nouveau l’espace public, se réappropriant un lieu qui lui était auparavant acquis. Mais une question de taille se pose: comment fait-on pour mettre Dieu en marché? «Il faut toujours adopter un discours qui soit moderne», souligne Hugo Léger. Pour qu’une campagne comme celle de l’Archevêché de Montréal soit efficace, elle se doit de briser l’image traditionaliste de l’Église, de réactualiser une institution qui, plus souvent qu’autrement, passe pour désuète. Que ce soit visuellement ou à l’aide du texte, la publicité doit interpeller; c’est le cas pour n’importe quelle campagne publicitaire. Ce qui diffère, ici, c’est qu’elle doit également provoquer une réflexion sur l’Église, sur sa place dans la société. Il ne s’agit pas seulement de solliciter des dons, souligne le concepteur-rédacteur, mais de réaffirmer l’importance de l’Église dans la société québécoise. Et ça, ce n’est pas une tâche aisée.


Année après année, les campagnes imprimées de l’Archevêché ont attiré l’attention du public. Que ce soit dans les pages de La Presse et du Journal de Montréal, ou encore dans le métro et sur les panneaux d’affichage, les créateurs de chez Bos ont su provoquer, sans toutefois dépasser les limites du bon goût. En l’an 2000, par exemple, de gigantesques panneaux interpellaient en toute simplicité les Montréalais, leur posant une question lourde de sens: «2000 ans après qui?». Une sorte de «Je me souviens» nouveau genre, ce slogan avait fait tout un effet. Puis, pour commémorer le premier anniversaire des événements du 11 septembre 2001, Bos a créé une publicité toute spéciale: les deux tours sur fond blanc, tout simplement. Puis, en regardant de plus près, on se rend compte que les édifices sont formés des mots qui composent le «Notre Père». Une image subtile pour laquelle l’agence s’est mérité le Grand coq d’or au Publicité Club de Montréal 2002, tout en permettant à l’Église de s’inscrire véritablement dans l’actualité, alors qu’elle s’était depuis longtemps effacée de la sphère politique ou sociale. Plus récemment, trois panneaux ont beaucoup fait jaser. En rouge sur fond noir, trois sacres: «Hostie», «Ciboire», «Tabernacle». L’allure provocatrice de la publicité attire tout de suite l’œil. Puis, sous chaque mot, le passant peut lire tout à son aise la définition première de ces mots qu’il connaît pourtant bien. Si les réactions ont été vives au lancement de cette campagne, le clergé, lui, n’a pas regretté son audace. Comme le souligne Hugo Léger, «l’Église était dans son plein droit» lorsqu’elle a choisi de redonner un sens sacré à ces mots souvent bafoués.


Peu importe la campagne, l’Église réussit certainement à se faire remarquer et, surtout, à changer son image. Elle se défait de son statut d’institution dépassée pour véritablement entrer dans la modernité. Plus que cela, elle se présente comme active, vivante, et, surtout, annonce au monde qu’elle a des choses à dire. Dieu n’est pas encore passé de mode.


Malgré la situation difficile dans laquelle se trouve l’Église au Québec, il reste que la société québécoise a des racines fondamentalement catholiques. Il revient aux publicitaires d’utiliser intelligemment cet héritage mais, surtout, de le faire vivre, de le ramener à la mémoire des Québécois. Parce que la religion catholique fait véritablement partie du patrimoine culturel du Québec, et pas seulement de son patrimoine religieux. Ce n’est pas pour rien qu’on appelle Montréal «la ville aux cent clochers». Or, ces cent clochers, il faut les entretenir.


Dans tout cela, l’Église fait preuve d’une très grande ouverture. Aux dires de Michel Ostiguy, président de Bos, le Cardinal Jean-Claude Turcotte est très conscient de l’impact favorable que peut avoir une bonne publicité et fait une pleine confiance à l’équipe créative de l’agence. Comme quoi Dieu – et ses représentants – sont peut-être plus cool et plus modernes qu’on ne l’aurait cru.



Catherine Côté-Ostiguy
Le Délit

BANKS VIOLETTE

BANKS VIOLETTE, né en 1973 à Ithaca, New York.

 

I’m interested in a visual language that’s over-determined, exhausted, or just over-burdened by meaning. The heavy-handed one-to-one of ‘black-equals-wrong’ is incredibly interesting to me — less as something that has a meaning in itself, but more in how those visual codes can somehow become reanimated. That’s constant throughout my work. All those images are like zombies — they’re stripped of vitality, yet sometimes they get life back in them … And, like zombies, usually something goes wrong when they wake up again.

 

BANKS VIOLETTE

 

For his first solo museum exhibition at the Whitney Museum of American Art in New York (May 2005), Violette erected a life-sized recreation of a burned-out church on a black stage, inspired by an image from the cover of a black metal record and surrounded by a 5.1 surround score composed by Thorns Ltd consisting of a varied backdrop of ambiances. According to Violette, the inspiration of the piece was a series of instances of arson committed by rival metal enthusiasts in Norway, which culminated in the 1993 knife murder of Øystein Aarseth, guitarist of the black metal band Mayhem by Varg Vikernes of the band Burzum …

 

BANKS VIOLETTE

BANKS VIOLETTE

BANKS VIOLETTE

BANKS VIOLETTE

BANKS VIOLETTE

BANKS VIOLETTE Sunn Oracle

Sunn O)))Oracle (2007)
Artwork by Banks Violette

 

ORAKULUM (Track B1) was originally composed for a live performance collaboration with the New York sculptor Banks Violette at the Maureen Paley Gallery in London, June of 06. Violette created sculptural representation of SUNN O)))s entire backline in cast resin and salt, including amplifier stacks, instruments, effects & accompaniments. In addition, black laquered stage platforms and sound panels were created as a basis for the groups actual backline setup, and a selection of drawings were presented within the context. The result of this performance and collaboration, which was conducted in a sealed gallery space, was intended to generate a feeling of absence, loss and a phantom of what once was.

 

BANKS VIOLETTE

BANKS VIOLETTE mas yet untitled' (TriStar horse) (2008)

BANKS VIOLETTE

BANKS VIOLETTE

BANKS VIOLETTE à team (gallery, inc.)

‘Until the Light Takes Us’, Première montréalaise

Repost du 9 Décembre 2009


Première montréalaise du film ‘Until the Light Takes Us’ au cinéma du Parc, vendredi 26 mars à 21:30. Version originale anglaise.


UNTIL THE LIGHT TAKES US


‘In 1991, Norwegian churches started to burn down, just after an underground circle of metal musicians had formed. The film reveals the true story behind the music, murders, and church burnings, and shows what happened to these young men, who tried to change the world using music, art, and violence. Ultimately, they lost control of what they had created.’


www.blackmetalmovie.com